La procrastination ou « A force de remettre à plus tard, la vie nous dépasse. » Sénèque

Aurélie Castex
La procrastination est une problématique que beaucoup d’entre nous rencontrons à un moment ou un autre. Que ce soit remettre à plus tard une tâche importante, un grand ménage ou éviter une responsabilité, la procrastination peut nuire à notre efficacité et à notre bien-être. Dans cet article, je te propose d’explorer les causes de la procrastination, ses conséquences et quelques stratégies efficaces pour surmonter cette habitude désagréable.
Plusieurs clientes avec qui j’ai travaillé sur ce sujet me disaient qu’elles avaient déjà fait des formations sur la gestion du temps, qu’elles avaient les outils, qu’elles regardaient des vidéos d’experts en super organisation, et que pourtant, cette habitude désagréable revenait toujours. Aller sur les réseaux sociaux, regarder des séries, faire une tâche ni importante, ni urgente alors que plein d’autres (importantes et urgentes) attendaient !
Mais la procrastination, ce n’est pas seulement une question d’organisation.
Et non, les procrastinateurs ne sont pas des fainéants !
D’après le Dr Piers STEEL (chercheur en psychologie et sciences comportementales, l’un des plus grands conférenciers au monde sur la science de la motivation et de la procrastination), au moins 95 % d’entre nous tergiversons au moins occasionnellement et environ 15 à 20 % le font de manière problématique.
Petite anecdote : j’ai acheté il y a au moins 12 ans un livre intitulé « Procrastination : comment ne pas tout remettre au lendemain » … et j’ai remis sa lecture pendant 11 ans ! Je l’ai lu en 2023, au moment où j’accompagnais ces clientes. Et il était finalement très bien !

Définition et origines de la procrastination
Alors tout d’abord, pour celles et ceux qui se demandent depuis le début de l’article de quoi je parle, la procrastination, c’est l’action de reporter des tâches importantes au profit de tâches moins urgentes ou plus agréables.
- Se lancer dans un grand ménage de printemps alors qu’on devrait faire sa déclaration d’impôt…
- … Ou reporter le ménage pour faire du shopping en ligne
- Répondre à un mail somme tout banal plutôt que de s’attaquer à un gros dossier
- Participer à une réunion avec des partenaires sur un sujet intéressant mais non prioritaire plutôt que de faire le budget prévisionnel
- Décider de trier et ranger 3 ans de mails non classés plutôt que de rédiger son compte-rendu d’activité
- S’engager à participer à plein de réunions plutôt que de travailler son plan de culture ou ses objectifs de l’année prochaine
- Ça peut également être le fait de passer beaucoup de temps à la mise en page d’un texte, d’une présentation ou d’un mail plutôt que de s’occuper du contenu
Et la procrastination, c’est aussi le report de la reprise du sport, retarder la prise de rendez-vous médicaux, ou ne pas prendre de décisions…
Cette habitude trouve ses origines dans plusieurs facteurs psychologiques, notamment la peur de l’échec, le perfectionnisme, le manque de motivation, et l’anxiété.
Donc pas de culpabilisation : c’est pas parce qu’on procrastine qu’on est une feignasse !
Les raisons internes de la procrastination
Donc si ce n’est pas parce que je suis une feignasse (ce qui est déjà une bonne nouvelle !), pourquoi je procrastine ?
Eh bien, plusieurs facteurs expliquent cette tendance. Suivant les tâches qu’on reporte et les moments de notre vie, la cause peut être liée à un ou plusieurs des facteurs suivant. Au-delà des raisons « pragmatiques » telles qu’un un planning surchargé ou un manque d’organisation, il y a aussi des raisons « internes », plus subtiles :
– La peur de l’échec ou de la réussite :
La crainte de ne pas réussir, de faire une erreur peut t’amener à procrastiner. Tu peux avoir, dans ce cas, peur de la critique et tu préfères alors remettre à plus tard. En gros « « Il est plus sûr de ne rien faire que de prendre un risque et d’échouer ou être critiqué(e) ». Tu as peut-être peur d’être jugé(e) incompétent(e), d’être confronté(e) à tes capacités réelles (et en procrastinant, tu peux alors continuer à « fantasmer sur tes capacités idéales »). Et en cas de peur du succès (ça arrive beaucoup plus souvent qu’on le croit !), tu peux avoir peur de devoir faire face à de nouvelles responsabilités, d’être trop mis(e) en avant… tu peux te dire « Si je fais bien cette fois-ci, on attendra toujours cela de moi ensuite, c’est trop. ». et donc tu retardes l’arrivée de ce moment redouté.
– Le perfectionnisme :
Le procrastinateur est un perfectionniste qui met la barre très très haute. Et ces attentes irréalistes peuvent paralyser ton action, car tu voudrais que tout soit parfait dès le début. Tu te dis « si ce n’est pas bien fait, cela ne sert à rien de le faire ». Tu vas alors refaire 10 fois ton power point, réécrire ce mail, … en fait, tu commences par imaginer produire un travail parfait, ce qui rend la tâche plus impressionnante qu’elle ne l’est en réalité. Ensuite, au fur et à mesure que la date butoir approche, tu cherches plutôt à éviter l’échec et tu se résous à produire un travail qui ne sera pas parfait. Mais ça ne sera pas la faute de ton potentiel manque de capacité, mais du fait que tu l’as fait au dernier moment. Ça te rassure sur ta peur de l’échec !
– Le biais du présent :
Il y a un biais cognitif (tu peux en savoir plus sur ce sujet dans cet article) qui s’appelle le biais du présent : L’idée, c’est qu’avec ce biais, tu accordes la plus grande valeur aux récompenses immédiates plutôt qu’aux récompenses futures, pourtant plus importantes. Et il a été montré que notre état émotionnel à la base influe ça. Si tu te sens triste, tu auras d’avantage tendance à céder à la tentation du plaisir immédiat. De même, si tu es quelqu’un qui a plutôt tendance à avoir peur du risque, c’est pareil, tu préféreras souvent la gratification immédiate (davantage de garantie de l’avoir).
– Le stress et l’anxiété :
Ces émotions peuvent te submerger, rendant difficile la concentration sur la tâche à accomplir. En procrastinant et en t’accordant un plaisir immédiat, tu vas faire taire ce sentiment, au moins sur le moment. Papoter avec les collègues, trainer sur les réseaux sociaux, manger du chocolat… tout ça, ça fait diminuer ton stress liée la tâche à réaliser.
– Le manque de motivation :
Lorsque tu ne trouves pas de sens ou d’intérêt dans une tâche, il est facile de la remettre à plus tard. Si tu n’arrives pas à trouver une réelle motivation intrinsèque (« c’est important pour toi de faire cette tâche pour telle raison »), mais que tu n’as qu’une motivation extrinsèque (« je dois le faire parce que… »), tu auras effectivement davantage tendance à procrastiner.
– Et ça peut être aussi le refus inconscient des exigences d’autrui et une façon de marquer ton désaccord, un problème d’acceptation de limites personnelles (« Tout ce que je fais doit aller facilement et sans effort. »), des difficultés à prendre des décisions (« Si je choisis cette tâche A, je ne pourrais faire la tâche B au même moment ») ou bien une façon de garder le contrôle en choisissant de faire les choses quand tu te sentiras prêt(e).
Les conséquences de la procrastination
- L’impact sur ton efficacité : c’est la première conséquence à laquelle on pense. La procrastination réduit ton efficacité et peut entraîner des retards dans les projets. Tu retardes, tu retardes, puis tu es à la bourre… Et donc, le point suivant arrive !
- Des émotions négatives : et notamment un sentiment de culpabilité, mais aussi de frustration, d’anxiété, de stress et de dévalorisation. Tu te sens mal, tu sais qu’en remettant à plus tard, tu ne feras qu’empirer la situation. … Et ça peut en plus te générer du stress. Tu sais que tu vas à l’encontre de ton intérêt quand tu procrastines… et pourtant… Tout ça va impacter ton bien-être général.
- Tes relations personnelles et professionnelles : La procrastination peut nuire à la confiance et à la collaboration avec les autres. Tes collègues et les autres personnes avec qui te travailles, ta famille, peuvent se demander pour quelles raisons tu ne fais pas ce que tu avais dit que tu ferais, ce qui était prévu. Ils peuvent t’en vouloir, te demander des explications. Et ça augmente ton sentiment de culpabilité et d’anxiété, voir renforce ton sentiment de « nullité ». Tu peux aussi craindre qu’ils te jugent.

Piers Steel résume la procrastination de la manière suivante : « Retarder volontairement un plan d’action prévu tout en s’attendant à être moins bien loti pour le retard ».
Identifier les signes de procrastination
- Tu reportes systématiquement des tâches importantes. Et peut-être souvent le même genre de tâches, celles qui te semblent difficiles, fastidieuses, complexes, longues.
- Tu te trouves des excuses pour éviter certaines responsabilités ou certaines tâches. Et souvent tu es (assez) conscient(e) que tu te mens à toi-même. Comme par exemple quand tu te dis qu’il faut ABSOLUMENT que tu ranges ton bureau avant de te mettre à préparer la réunion importante de demain, sinon, « tu ne peux pas avoir les idées claires ». Tu sais bien que l’urgence n’est pas là et que tu pourrais préparer cette réunion avec ce tas de papiers à coté de toi… si, si, tu le sais !
- Tu te laisses facilement distraire avec des activités secondaires : les notifs des réseaux sociaux sur ton téléphone, le coup de fil à tel(le) partenaire trop sympa alors que ce n’est pas du tout le moment…
- Et ce sentiment fréquent de culpabilité et de stress liés aux délais non respectés que tu ressens. À ne pas négliger ! car parfois, on se persuade bien qu’on est actif et qu’on fait quelque-chose d’absolument urgent et important et que ce n’est pas notre faute si on ne s’est pas encore mis(e) à ce dossier. Sauf qu’il y a ce sentiment pas trop agréable qu’on ressent, dans la gorge, dans la poitrine ou au creux du ventre. Cette petite boule, elle, elle dit « c’est pas ça que tu devrais faire ! ».
Quelques techniques pour surmonter la procrastination
1. Identifier tes pensées et tes émotions qui t’incitent à procrastiner
Tout d’abord, il est important d’identifier et être conscient(e) qu’on est en train de procrastiner sur une tâche (cf ci-dessus).
Ensuite, tu peux alors essayer d’identifier les pensées automatiques qui te viennent (et là, je t’invite à lire ou relire les articles « nos pensées créent notre réalité » et Prendre conscience de ses pensées automatiques). Ce sera peut-être quelque chose du genre :
- Je me sens obligé de réussir
- Je me considère comme un(e) « nul(le) » si j’échoue après avoir tenté
- Je m’inquiète de ce que les autres penseront de moi
- Je ressasse mes échecs antérieurs
- J’ai trop de choses à faire
- Je manque de persistances et de ressources
- Je manque de confiance en moi
- Je me demande si mes efforts vont me permettre de réussir comme les autres veulent
- Je me sens nul(le)
- Ce travail est trop difficile pour moi
- Cela ne sert à rien de commencer pour mal faire
Comme tu l’as compris, ces pensées vont générer des émotions de culpabilité, d’anxiété, de frustration, de stress, d’impuissance, de honte qui vont entretenir ta procrastination
En fait, tous ces sentiments te semblent, sans que tu t’en rendes compte, plus faciles à supporter que le sentiment potentiel de vulnérabilité liés au fait d’être exposé(e) et vu(e)s tels qu’ils sont. Et finalement, on peut dire que la procrastination te sert de protection.
2. Identifier tes besoins
Je t’invite ensuite à identifier tes besoins non ou mal satisfaits et les actions à mettre en place pour les satisfaire.
Une de mes clientes, qui m’avait contactée pour que je l’accompagne à se défaire de sa procrastination était tellement concentrée sur les « il faut » et « je dois » qu’elle avait complétement oubliée de se concentrer sur elle, ses besoins.
Elle avait beaucoup de travail, et culpabilisait beaucoup de procrastiner plutôt que de faire ce qu’elle avait à faire. Elle partait en week-end avec des amis, prenait du temps pour dormir, elle regardait des séries… puis elle s’en voulait à mort, se jurait que plus jamais, se préparait des programmes intenables, avec aucun temps morts… et rebelotte.
Dans tout ça, elle oubliait qu’elle avait des besoins : besoins de repos, de prendre soin de soi, de décompresser. Une fois qu’elle a eu pris conscience de ça, elle a organisé des programmes en prenant en compte ces temps, et en ayant cette assurance que ces besoins seraient satisfaits, et elle a beaucoup moins procrastiné.
3. L’organisation du procrastinateur structuré
La procrastination structurée consiste à créer une liste de choses à faire avec en tête de liste une tâche qui semble « ultra-importante » (mais qui au fond ne l’est pas tant que ça). C’est cette dernière qui te motivera à accomplir des choses à priori moins importantes.
Les to-do-List peuvent être d’une vraie utilité à un procrastinateur :
- Tu peux faire une liste de choses simples à faire: les choses que tu fais spontanément en commençant ta journée. Comme tu les fais automatiquement ou presque, tu démarres chaque jour avec le sentiment positif d’avoir accompli beaucoup de choses utiles.
- Il te sera utile de découper les tâches très imposantes en des tâches extrêmement simples : une autre stratégie qui te permet d’avancer sans être paralysé par des projets d’ampleur.
- Une autre stratégie consiste à faire une liste de choses à ne pas faire : par exemple de choses qui entraînent des comportements de procrastination. En ne les faisant pas, tu vas avoir l’impression d’avancer, puisque tu évites de procrastiner et que tu rayes ces actions de ta to-do-List au fur et à mesure.
4. Des méthodes de gestion du temps :
Tu peux utiliser la technique « Pomodoro » : L’idée, c’est d’accepter de faire le premier pas désagréable de débuter la tâche en gardant à l’esprit que ce ressenti disparaîtra plus vite que tu ne l’imagines. En effet, on a tendance à croire que le sentiment désagréable du début de la tâche va durer indéfiniment. Sauf qu’en fait, ce sentiment se stabilise à un moment assez proche du début de la tâche. Puis le plus souvent, le sentiment désagréable diminue, fait place à du plaisir pour finalement permettre de la satisfaction. À un moment, la fatigue survient.
Donc la technique, c’est de travailler en se concentrant consciencieusement pendant 25 minutes, puis prendre une pause/récompense de 5 minutes (scroller sur les réseaux sociaux, surfer sur le net, prendre une tasse de café, sortir respirer le bon air, t’étirer et bavarder sans réfléchir, …).
Et tu reprends pour 25 min. et tu verras que finalement, comme la tâche te sera finalement pas si désagréable, tu seras surpris de réaliser que tu sauteras la pause pour continuer, comme tu es lancé(e) !
5. Renforcer ta volonté et ton engagement :
En visualisant les bénéfices de l’accomplissement des tâches pour toi (ta motivation intrinsèque).
Une erreur classique que font les procrastinateurs est de croire qu’il faut que la motivation soit là pour commencer à agir alors que c’est l’inverse.
Importance de la bienveillance et de l’auto-compassion
Tout ce ceci étant dit, je t’invite toutefois à être indulgent envers toi-même. Accepter que la procrastination arrive de temps en temps va te permettre de réduire ton stress et d’aborder les tâches avec plus de sérénité. Et ainsi, finalement, à moins procrastiner.
Comme pour ma cliente dont je parlais plus haut, dans notre société actuelle, où les stimulations diverses, la surcharge de responsabilités et le surcroît de travail font souvent partie intégrante du quotidien, la procrastination active peut répondre au besoin d’appuyer sur le frein et de s’occuper de soi, plutôt que de s’efforcer de répondre aux exigences extérieures. Apprendre à ne pas se mettre la pression et s’autoriser à se faire du bien sans culpabiliser est un des atouts du coaching pour désapprendre à procrastiner.
En résumé
- Prendre conscience du fait que tu es en train de procrastiner
- Identifier les pensées et les émotions liées à ce sur quoi tu procrastines et les remplacer par des pensées aidantes, générant une motivation intrinsèque
- Identifier tes besoins non satisfaits qui t’amènent à procrastiner et planifier des moments pour y répondre
- Te lancer dans l’action, car le plus dur, c’est de s’y mettre
- Te lâcher la grappe et arrêter de culpabiliser, car ça arrive à tout le monde et plus tu culpabilise, plus tu procrastines
En coaching, on va travailler sur tout ça, de manière approfondie
On va travailler sur tes valeurs, pour identifier ce qui est important pour toi et te motive intrinsèquement, identifier tes besoins, travailler sur tes pensées automatiques et croyances limitantes et je vais t’accompagner pour mettre en place tes propres techniques pour palier à cette procrastination.
Le témoignage de Paméla 🤩
« [Quand j’ai contacté Coralie], j’avais des défis à relever, notamment la validation de mon master, et la procrastination constituait un obstacle constant. Il me semblait que cette fois, je ne pourrais pas surmonter ce défi seule.
C’est pourquoi j’ai entamé un parcours de coaching avec Coralie, cherchant son accompagnement pour mieux comprendre mes mécanismes internes et élaborer un guide pratique pour mieux fonctionner. Grâce à son écoute attentive, à sa méthodologie et aux outils que nous avons développés ensemble, j’ai réussi à relever mon défi initial, et bien au-delà. Aujourd’hui, je dispose d’un guide pratique qui neutralise ma procrastination, d’une meilleure connaissance personnelle, de mes croyances limitantes et de mes valeurs. Le coaching avec Coralie a été un soutien bienveillant dans le rire et les larmes ainsi qu’une expérience transformative, qui a considérablement amélioré ma compréhension de moi-même et ma capacité à surmonter les obstacles. Je me sens capable et j’ai foi en l’avenir grâce à toi, encore merci Coralie ! »
Ping : #15 Les émotions au travail, c’est vraiment un point crucial ! - Coralie Pireyre Coaching & Formation
Ping : #18 Quand la passion prend toute la place... et le reste en souffre - Coralie Pireyre Coaching & Formation