#4 Nos pensées créent notre réalité

« La carte n’est pas le territoire »

Un des trucs qui m’a le plus marquée pendant ma formation de coach, c’est la découverte des croyances et l’après-midi où le formateur nous a dit « la carte n’est pas le territoire ». Avec cette phrase, le philosophe et scientifique américano-polonais Korzybski a fait référence en 1933 à la perception du monde (le territoire) par l’intermédiaire des sens, qui permet d’en faire une représentation interne dans le cerveau, la carte. Cette carte interne n’est jamais la réplique exacte du monde externe, elle n’est qu’une construction de notre esprit.

La carte du territoire de chacun(e) est façonnée par notre perception filtrée des informations qui nous parviennent, et ce processus de filtrage est influencé par nos valeurs, nos croyances, nos souvenirs, nos expériences…

J’ai trouvé ça fou. Peut-être que vous, de votre côté, vous êtes déjà conscient(e) de ça. Moi, je vois les choses complètement différemment maintenant et je me demande comment j’aurais abordé mon ancienne vie professionnelle en ayant eu conscience de ça.

L’importance de la perception dans notre compréhension du monde.

L’idée, c’est que le modèle du monde de chacun(e) n’est qu’une représentation subjective de la réalité. C’est une représentation mentale car, à la différence d’une carte, elle ne prend pas forme dans le monde physique. Cependant cette représentation mentale joue le même rôle qu’une carte physique puisque nous créons des cartes mentales personnelles d’après nos expériences et nos filtres pour évoluer dans l’environnement. Elles nous servent de repère pour agir et communiquer avec l’extérieur. Mais une carte, qu’elle soit mentale ou physique n’est qu’une représentation de la réalité. Une carte n’est jamais identique au territoire qu’elle modélise. Chaque modèle du monde est unique. Aucun modèle n’est plus vrai ou plus valable qu’un autre.

Ainsi, les débats de « Il a tort » ou « J’ai raison » prenne une tout autre tournure.

la carte n'est pas le territoire

En effet, nous ne connaissons a priori pas le modèle du monde des autres. Pour cette raison, les relations entre les individus peuvent générer de l’incompréhension et des difficultés à communiquer. Chacun se réfère à ses propres cartes et elles sont différentes d’un individu à l’autre.

Nos perceptions sont des représentations subjectives et simplifiées de la réalité

Pour construire notre « carte du monde », on va le faire à travers des filtres :

  • Les filtres neurologiques : Nous captons les informations venant de notre environnement au travers de nos 5 sens. On a tous un canal ou plusieurs canaux privilégiés. Nous sommes donc tous plus ou moins réceptifs à certains types d’informations sensorielles. Et ensuite, nos perceptions sensorielles, et les informations qu’elles contiennent, sont traitées par notre cerveau au travers de 3 mécanismes inconscients :
    • La sélection (ou l’omission) : c’est un processus qui permet de limiter la perception de stimuli en portant notre attention sur certains aspects de notre environnement, et pas d’autres. La sélection nous évite d’être submergés par la quantité d’informations que nos sens perçoivent en continu. Ce processus devient problématique lorsqu’il nous empêche d’avoir accès à certaines informations qui nous permettraient de sortir d’une difficulté.
    • La Généralisation : processus par lequel on tire d’une expérience personnelle et ponctuelle une conclusion générale, qui sera appliquée à toutes les situations similaires. Elle permet d’étendre ce qu’on a appris dans une expérience, à toutes les situations appartenant à une catégorie identique ou proche. Utile dans l’apprentissage, ce processus peut aussi nous amener à généraliser de façon abusive.
    • La Distorsion : processus qui permet de modifier nos représentations. La distorsion est une déviation entre les données sensorielles et leur interprétation. La distorsion devient problématique lorsqu’elle nous amène, par exemple, à attribuer des intentions à d’autres personnes ou à faire des présuppositions négatives en l’absence d’éléments objectifs.
  • Les filtres socio-culturels : ils contribuent grandement à façonner notre vision du monde. Notre culture, la société dans laquelle on vit (les médias, la pub, les lectures, les échanges avec les autres), transmise en grande partie par notre langage, participe largement à former, voire déformer, les représentations de ce que nous avons perçu.
  • Les filtres personnels, c’est-à-dire notre éducation, l’influence des figures parentales, les expériences de notre enfance et de notre vie d’adulte, influencent notre manière de concevoir le monde, la place que nous y occupons, notre valeur personnelle et celle des autres.

Ces filtres, qu’on pourrait comparer à des filtres physiques qui retiennent certaines particules et laissent passer d’autres, vont influencer nos fonctionnements internes et nos comportements externes et, par conséquent, façonner nos pensées, et notre personnalité !

Donc, on a tous notre propre carte du territoire et toutes les cartes sont plus ou moins différentes. On peut être certain(e) que notre carte est la réalité universelle… Mais c’est une illusion !

Par exemple, les filtres de perceptions d’un peintre lui feront voir un arbre différemment d’une arboricultrice, qui elle-même verra cet arbre d’une façon différente d’un charpentier, qui aura encore une vision différente d’une botaniste, d’un phytopathologiste, d’un pique-niqueur, … Chacun aura raison, sa carte de cet arbre sera bonne pour lui ou elle.

Et donc, nos pensées créent notre réalité !

Prendre déjà conscience que notre réalité n’est pas la même que celle du voisin est un premier pas vers des relations plus apaisées et plus faciles.

Et c’est déjà utile de savoir ça, plutôt que de se dire « non mais il est vraiment c…, il voit bien que c’est comme ça, pourquoi il s’obstine à me dire le contraire. Soit il comprend rien, soit il me cherche des embrouilles, c’est sûr » ! ». Ou bien « tout le monde sait bien que quand on veut se faire entendre, il faut parler fort, s’imposer ». Ainsi, si on va plus loin, on peut dire que la façon dont on se sent est le résultat de nos pensées. Surtout si on se rappelle du fait que nos pensées induisent nos émotions (je l’ai développé dans cet article).

On a entre 50 000 et 70 000 pensées qui nous traversent la tête chaque jour.

Et parmi celles-ci, la grande majorité des pensées sont toujours les mêmes, qui passent en boucle. Surtout en arrière-plan, sans qu’on n’en ait forcément conscience (les filtres agissent !). Et comme on a un biais de négativité (j’y reviendrais dans un prochain article), ces pensées sont souvent négatives.

Et alors, comme le cerveau a plein de trucs à gérer, grâce aux filtres, il se met souvent en pilote automatique sur des sujets familiers, qui se présentent régulièrement, pour garder toute son énergie pour considérer des sujets nouveaux qui pourraient être une source de « danger ». Ça lui permet d’aller plus vite, de ne pas se reposer la question à chaque seconde de ce qu’il faut faire, comment réagir.

Nos croyances sont comme un chemin de randonnée balisé dans notre cerveau

Donc quand on a pris l’habitude de penser certaines choses sur certains sujets, il y a un chemin balisé dans le cerveau sur notre carte du monde. Comme un chemin de randonnée souvent utilisé : le chemin est tracé et c’est facile pour les randonneurs de s’y engager. Là, c’est pareil, le cerveau ne se pose pas la question, il fait des économies d’énergie à ne pas aller débroussailler et marquer un autre chemin, il crée des automatisations, utilise sa carte et c’est ainsi que le même chemin amène la même pensée (et comme on l’a vu dans le dernier article, la même émotion).

Souvenez-vous quand vous avez appris à conduire « j’appuie sur la pédale d’embrayage en même temps que je change de vitesse » … Et maintenant, vous n’y pensez plus, le chemin est tracé, c’est intégré dans votre carte, les filtres se consacrent à autre chose et le cerveau peut se concentrer sur les infos à la radio, votre chanson préférée ou bien à anticiper et angoisser sur la réunion à venir ou ruminer sur la dernière réflexion de son collègue.

En gros, l’objectif du cerveau, c’est de fonctionner de manière optimale sans se poser de questions sur tout, tout le temps. Ne pas se refaire à chaque fois une opinion à partir de rien ou réapprendre à conduire 3 fois par jour !

Et comme on pense toujours pareil, on se sent la plupart du temps pareil.

Si dans ma carte du territoire mes collègues sont meilleurs que moi, j’angoisse toujours de la prochaine réunion, de leur regard et de celui de ma cheffe qui (selon moi) pense que quand-même, les autres sont meilleur(e)s, alors je vais continuer à me sentir angoissé(e) et moins bon(ne) et donc à ne pas mettre en avant mes réussites, par exemple.

Nos croyances influencent et constituent notre carte mentale du monde.

Et en effet, quand on a pensé quelque-chose suffisamment de fois, la pensée devient une croyance. Un bout de notre carte du monde. Bien solide. Une croyance est une affirmation personnelle que nous pensons vraie, qu’on ne remet même pas en question, qui porte sur la perception que nous avons de nous-même, des autres et du monde en général. Les croyances sont des interprétations subjectives à propos des relations entre les choses et les événements, tels que chacun les perçoit. Elles impactent tous les aspects de notre vie : relations (avec nous-mêmes, avec les autres, avec la vie), parcours professionnel ou affectif, réussite sociale, aisance matérielle, et même la santé ou la durée de vie…

Les croyances qui nous éloignent du bonheur et de notre vie choisie sont des croyances limitantes.

Exemples : « si je demande une augmentation, je vais passer pour quelqu’un de vénal(e) », «si je dis ce que je pense vraiment les autres vont me trouver bizarre », « les autres sont bien plus à l’aise que moi en réunion », « mes collègues s’en sortent mieux que moi sous la pression », « comme je suis débutante, je ne peux pas viser ce poste », « un commercial doit avoir un salaire fixe et un variable », « ma cheffe ne m’aime pas », « comme c’est une femme, elle est bienveillante est attentionnée », « avec mon bac + 5, je dois viser plus haut et être manager même si j’adore mon métier de vendeuse », « téléphoner aux gens pour leur parler de mes services va les déranger », « je ne peux pas vendre ça à ce prix, les gens ne vont pas acheter ! » ….

Vous vous retrouvez ? Vous identifiez certaines des vôtres ?

On pense cela vrai, ça fait partie de notre carte du monde, d’une réalité. Et pourtant, ce n’est qu’une façon parmi beaucoup d’autres de voir la réalité. En effet, ce ne sont que des pensées, le résultat du catalogage de notre cerveau, de ces automatisations, interprétations rapides et potentiellement erronées…

Identifier et déloger les croyances limitantes

Certaines croyances sont largement partagées (on a donc l’impression qu’elles sont plus vraies), d’autres très personnelles. Certaines sont faciles à identifier chez nous. D’autres sont tellement bien ancrées, elles font tellement partie de nous, parfois même sont inclue dans une autre croyance (comme les pelures d’un oignon, la croyance sous la croyance) que c’est difficile de les identifier, et encore plus de les déloger.

Et je vous le révèle là, c’est ce à quoi on occupe une grande partie du temps en coaching : identifier et déloger les croyances limitantes qui nous freinent, nous bloquent, nous empêchent, et nous font croire qu’on est moins bien, qu’on a moins de valeur, que seuls les autres peuvent nous donner notre valeur, qu’on ne peut pas dire non, que si on donne notre avis, on sera jugé(e)s… Pour cela, on prend de la hauteur, on s’observe, on met cela en rapport avec nos valeurs, on découvre notre identité propre. Et en se distinguant de nos pensées, on peut agir sur celles-ci, voir les choses différemment, choisir d’autres pensées tout aussi vraies mais plus utiles, plus agréables, plus efficaces.

déloger les croyances limitantes

Une de mes clientes, P. avait la croyance qu’elle devait être loyale avec tout le monde : sa famille, ses amis, sa belle-famille, son mari décédé, ses voisins… Dans tout ça, elle s’oubliait complètement. Ça provoquait de la colère (dans sa carte du monde, tout le monde devait être loyal), de l’épuisement et l’éloignait clairement du bonheur. Elle se renfermait. On a travaillé pendant plusieurs séances sur cette croyance. A chaque nouvelle séance, cette cliente abandonnait un bout de cette croyance. Au final, elle a gardé la croyance (aidante) de se devoir loyauté à elle-même. C’est devenu son leitmotiv et lui a permis de se défaire de fonctionnements qui l’empêchaient d’avancer vers sa vie choisie.

Et au final, quand on devient aguerri(e) à la pratique de l’auto-observation, on ne se dit plus « ma collègue est vraiment meilleure que moi en intervention, c’est sûr, ça me déprime et ça ne changera jamais », mais « tiens, j’ai la pensée que ma collègue est meilleure » et on choisit ensuite de penser autre chose (on peut si on le souhaite continuer de penser ça et de déprimer, chacun fait comme il veut !).

Dans le prochain article, je vous raconterai les raisons pour lesquelles notre cerveau aime bien nous amener spontanément des pensées plutôt négatives (si c’était l’inverse, on en parlerait moins !).

2 réflexions sur “#5 Nos pensées créent notre réalité”

  1. Ping : #5 Les Biais Cognitifs : Notre cerveau façonne notre réalité quotidienne! - Coralie Pireyre coaching & formation

  2. Ping : #15 Les émotions au travail, c’est vraiment un point crucial ! - Coralie Pireyre Coaching & Formation

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